Témoin de la Qualité : Torolf PAULSHUS

Torolf PAULSHUS est Président de l’EOQ (European Organization for Quality). Il a accepté de répondre à nos questions sur la Qualité, sa vision, son expérience…

France Qualité : Quels sont pour vous les principales évolutions ou évènements qui ont marqué la Qualité et les démarches de progrès ces quinze dernières années ? 
Le management de la qualité et des processus a changé de façon spectaculaire en raison de la digitalisation au cours des quinze dernières années. Et la pandémie de COVID-19 a soudainement augmenté la digitalisation de façon exponentielle en quelques semaines au cours du premier semestre de 2020. La lenteur de l’acceptation de la digitalisation dans les entreprises a été remplacée par une course à la digitalisation comme condition de survie. La fermeture des frontières et l’arrêt des voyages aériens exigeaient de nouvelles solutions de communication pour survivre dans les affaires. Les exigences de qualité sont restées les mêmes. Heureusement, MS Teams et d’autres fournisseurs de communication vidéo sont arrivés et nous ont sauvés du désastre. Par exemple, l’audit du système Qualité pré-COVID-19 n’était pas accepté en visioconférence. En six mois en 2020, « le monde de la Qualité » a changé l’audit des systèmes Qualité pour toujours. Nous avons rapidement appris combien cette nouvelle façon de travailler était efficace en termes de temps et de coûts, à tel point que nous ne reviendrons plus jamais à l’audit physique seul.

Qu’est-ce qui a changé dans votre métier de qualiticien ces quinze dernières années ?
Ayant participé à l’activité de l’industrie de l’énergie en Europe, aux États-Unis et au Moyen-Orient au cours des quinze dernières années, je crois juste de dire que les concepts et les exigences Qualité n’ont pas beaucoup changé. Mais là encore, c’est le management des exigences, des processus et des outils Qualité qui a beaucoup changé. La digitalisation a rendu les chaînes de valeur et les processus, de bout en bout des entreprises et des organisations, accessibles au management Qualité d’une manière totalement nouvelle. Et nous sommes inondés d’outils et d’applications numériques. Une entreprise peut avoir 400 % de fonctionnalité des applications par rapport à ce qui est nécessaire, tout cela pour son bon usage, mais s’il manque une coordination structurelle et fonctionnelle globale du dispositif - par rapport au modèle de processus d’entreprise -, elle devient incontrôlable. C’était un défi il y a quinze ans, et sa complexité augmente chaque jour pour les responsables Qualité.

Qu’évoque pour vous la Nouvelle Qualité, qui rappelons-le se veut globale, pragmatique, innovante et participative ?
Les défauts/déchets et le besoin de leur réduction sont un élément déclencheur important pour moi. Rien n’est plus démotivant que d’être dans une organisation produisant des défauts/déchets - sans être reconnu ou découvert. Le rêve souhaité est d’avoir accès à la prise de décision, avec des exigences structurelles et fonctionnelles afin que les performances Qualité puissent être mesurées et améliorées par des changements contrôlés.

Comment voyez-vous la Qualité dans dix ans ? Quels rêves formulez-vous pour la Qualité ?
Pour le développement de la Qualité globale, dix ans représentent une courte période. Les concepts Qualité fondamentaux sont déjà bien développés et utilisés. En outre, des concepts, modèles et approches mixées de Qualité distincts sont disponibles, comme le Lean Six Sigma. Il y a fort à parier que les exigences en matière de management Qualité continueront à se développer dans toutes les entreprises et industries, sous l’impulsion de la digitalisation et de l’informatisation. Jusqu’à présent, la gestion de l’information n’a pas été traitée comme une partie fondamentale deu management Qualité, mais avec la digitalisation croissante, cela va changer. L’adoption du management de l’information est une partie du management Qualité, aussi évidente que le management des processus. En fait, le potentiel du management Qualité comprend la coordination de tous les aspects structurels de l’information et du système. Il n’y a pas de management Qualité sans management de l’information.
Mon rêve pour la Qualité est la reconnaissance de l’exigence structurelle des systèmes pour atteindre les résultats des améliorations, et que cette coordination structurelle soutienne toutes les parties du management Qualité.   

Témoignage extrait de la Revue Echanges n°50. 
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